Inauguration de l'orgue de Saint François Xavier (1879)

Jeudi soir, l'inauguration solennelle de l'orgue monumental construit par MM. Fermis et Persil avait attiré à l'église Saint-François-Xavier une affluence considérable qui, dès sept heures du soir, avait commencé à envahir la nouvelle église, en dépit du service d'ordre, d'ailleurs insuffisant, envoyé par la Préfecture.
La solennité était présidée par Mgr Le Courtier, archevêque de Sébaste. Parmi les assistants nous avons remarqué Mme la princesse de Bourbon, M. le duc et Mme la duchesse de Nemours, MM. le prince Czartoriski, duc d'Alençon, les ambassadeurs d'Allemagne, de Hollande, de Portugal, le ministre du Pérou, etc. Le Pater noster de Niedermeyer et le Fons pietatis d'Haydn chantés par Faure, et un Ave verum de M. Renaud, chanté par M. Vergnet, avec accompagnement des chœurs de l'Opéra, sous la direction de, M. Colonne, avec orchestre, ont produit grand effet.
Mais la principale attraction consistait dans l'inauguration du grand orgue. Autrefois, une des difficultés consistait dans la force relativement énorme que devait déployer l'organiste pour transmettre le mouvement des touches du clavier au jeu de l'instrument. M. Permis, simplifiant et perfectionnant l'idée de l'application de l'électricité, due à M. Barker, a imaginé d'employer à la transmission des jeux de l'orgue l'air comprimé, que l'on a déjà vu partout remplacer avec avantage l’électricité dans les appareils de sonnerie. Le succès a été complet. L'orgue de Saint François-Xavier est doué d'une grande puissance et se prête à tous les effets de force et de douceur.
Si nous ajoutons que le système de MM. Fermis et Persil permet de réaliser de notables économies d'emplacement et de prix, on jugera de l'importance du progrès accompli par ces facteurs, déjà honorés d'une médaille à la dernière Exposition universelle.

Le Figaro – Samedi 1er mars 1879

INAUGURATION DE L'ORGUE MONUMENTAL M L'ÉGLISE SAINT-FRANÇOIS-XAVIER
Complétons ce que nous avons dit sur cette solennité religieuse et artistique, présidée par Mgr Lecourtier, l'éminent et vénéré prélat.
Passons au concert pour lequel avaient été convoqués l'orchestre et les chœurs de l'Opéra et du Conservatoire. M. Faure, le grand artiste, a chanté deux morceaux qui ont été littéralement acclamés par l'assistance Le Pater noster, la sévère composition de Niedermeyer, et le Fons pietatis d'Haydn M. Faure a interprété ces deux classiques mélodies, qu'il a chantées comme il convient à un maître.
M. Vergnet de l'Opéra a dit avec une rare pureté et une grande suavité, le solo de ténor d'un Ave verum de M. Albert-Renaud, l'organiste titulaire de l'église Saint-François-Xavier; M. Renaud est un jeune compositeur de beaucoup de talent, qui par parenthèse a le don, rare aujourd'hui, de comprendre la musique religieuse.
Gardons-nous bien d'oublier un artiste de grand talent, M. Widor, l'organiste de Saint-Sulpice qui a non-seulement fait entendre plusieurs morceaux de ses symphonies mais exécuté une de ses nouvelles compositions intitulée le Psaume 142; cette œuvre importante a été présentée au public accompagnée par deux orgues, deux orchestres et les chœurs, dirigés par M. Ed. Colonne, l'éminent chef d'orchestre à qui on doit la vulgarisation de tant de morceaux des grands maîtres.
Deux autres organistes, MM. Franck, le professeur du Conservatoire, et Gigout, organiste de Saint-Augustin, ont pris brillamment part à cette fête artistique, qui avait encore pour collaborateurs M. Eugène Dardet, le maître de chapelle. M. Paul Viardot le violoniste distingué et M. Gillet, le cor anglais dont le talent est si apprécié des musiciens. En somme, une belle soirée dont se rappelleront les amateurs de musique qui garderont le souvenir des belles orgues de MM. Fermis et Persil, et du programme de ce concert vraiment exceptionnel.

Le Figaro – Lundi 3 mars 1879